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Quand le soleil s'éteint

4. Étretat, Normandie
Musique : Hand Covers Bruise – Trent Reznor & Atticus Ross / The Social Network (OST)

 

 

— Quelle heure il est ? demande Julien.

La voix calme et posée tire Lyes de sa contemplation de la mer, que l’obscurité recouvre peu à peu. C’est le but, songe-t-il. Julien sait toujours quoi dire afin d’endiguer les chagrins quand ces derniers s’attardent. Dommage qu’il ne parvienne pas sécher ses propres larmes en plus de celles des autres.

Kathia consulte son téléphone et répond en même temps que Pierre :

— 21 h.

— Trop tard pour rester dehors.

Ce qui leur arrache un rire. Il y a entre eux deux une étonnante complicité, quelque chose qui ne devrait pas relier la première de la classe à celui qui a déjà été viré de deux établissements scolaires. Pierre tire une dernière taffe de sa cigarette avant de l’éteindre avec précaution contre la semelle de sa chaussure, puis il ajoute :

— Ça me fait mal de le dire mais on devrait faire demi-tour et trouver un hôtel pour la nuit. Les flics n’accepteront pas qu’on fasse du camping sauvage au milieu de nulle part, sans compter qu’on pourrait tomber malades nous aussi. On devrait rentrer.

La voix de la sagesse, que Lyes voudrait ignorer. Ils n’ont pas le choix, pourtant.

— Le Somm ne s’attrape pas comme ça, objecte-t-il.

— On ne sait pas. Même ton frère n’en était pas sûr. Et je n’ai pas envie de crever.

Bien sûr que non. Personne n’en a envie, et Lyes non plus. Il a beau fixer les vagues en espérant que le monde s’effondre là, maintenant, tout de suite, c’est parce qu’il veut vivre qu’il tenait à effectuer ce voyage. Parce qu’il devait déposer sa charge une fois parvenu à destination, dans le jardin envahi d’hortensias, et reprendre son existence comme avant.

Il ne comprend pas pourquoi ses amis le regardent comme s’ils attendaient sa décision. Lucas était le meneur, pas Lyes. Lui, il se contentait de suivre le mouvement parce que c’était plus facile. Il a organisé ce road-trip pour lui avant tout car il sait quelle place prennent les fantômes quand on les laisse faire ; les autres pourraient parfaitement l’abandonner sur cette plage et repartir à Orléans.

— Julien croit que tu vas accomplir un miracle et effacer sa peine, lui a dit Kathia la veille, alors qu’ils montaient la tente au milieu des champs. Et Pierre, lui… Il a vu ce que tu es capable de faire. Tu lui as rendu service, il te rend la pareille.

Lyes s’en doutait, mais le poids de la responsabilité qui s’est abattu sur lui l’a effrayé. Il aurait dû partir sans eux, traîner son propre boulet sans personne pour regarder.

— Et toi, tu es venue pourquoi ? a demandé Lyes à Kathia.

Elle a répondu avec son sourire timide, en baissant les yeux :

— Je ne voulais pas que tu sois tout seul devant lui.

À chacun sa peine, et sa raison de l’accompagner sous le soleil qui s’éteint, sous la menace d’une épidémie d’ampleur. Alors que la plupart des gens se confinent chez eux, terrifiés par cette épée de Damoclès dont ils ne distinguent pas entièrement les contours, eux quatre ont choisi de fuir leur vie vacillante à la recherche d’un fantôme. La fin du monde ne suffira pas à nous arrêter, riait Pierre. Malheureusement, si. Cela a fini par arriver.

Une vibration dans sa poche le surprend. Sa mère lui a envoyé plusieurs textos, les premiers il y a quelques heures ; Lyes ne les reçoit que maintenant à cause du réseau saturé.

S’il te plaît, dis-moi que tu vas bien. Je suis inquiète.

Ce dernier message, dont les mots pudiques débordent d’angoisse, lui serre le cœur.

— La fin du monde a gagné, soupire-t-il. D’accord, il est temps de rentrer.

Ses amis ne s’en rendent sûrement pas compte, mais Lyes ressent leur soulagement, comme s’ils avaient retenu leur souffle en attendant qu’il prenne sa décision. Non, vraiment, il n’apprécie pas de devoir choisir à leur place.

— Mon père a essayé de me joindre, dit alors Kathia. Mais je n’ai pas de réseau.

— Moi j’en ai, indique Julien.

Il lui tend son mobile, qu’elle accepte avec gratitude avant de s’éloigner pour passer son coup de fil. Lyes s’attend à ce que l’appel ne se déroule pas très bien.

— Ça fait deux jours qu’elle n’ose pas te dire de rentrer, révèle Pierre. Ce que Selim a raconté lui a fait peur et ses parents la harcèlent.

— Pourquoi elle n’a rien dit ?

— Parce qu’elle ne voulait pas tout gâcher.

La voix de Kathia s’élève dans le vent, mais Lyes ne saisit pas un mot de la conversation. Ce n’est pas la première fois que les parents de la jeune fille lui font des reproches ; soit elle s’en va trop loin, soit elle rentre trop tard… Ils l’empêchent de prendre son envol et cela lui pèse de plus en plus.

— Ils abusent, commente Julien.

Il allait ajouter quelque chose mais s’interrompt quand Pierre s’allume une autre cigarette.

— Ça te dit quelque chose, le tabagisme passif ? râle-t-il. Mes fringues vont encore sentir la clope.

Le réprimandé se contente de sourire, comme toujours, posant sur Julien ce regard attentif et doux que Lyes a déjà surpris des tas de fois. Si la fin du monde doit réellement survenir, comme Pierre aime en plaisanter, pourquoi met-il autant de temps à se déclarer ? Pourquoi attendre, alors qu’il sous-entend toujours qu’il sera trop tard à un moment donné ?

Parce que tu lui fais miroiter qu’il existe des moyens de se rattraper. Tu es la preuve vivante que ce qui est mort peut encore parler.

Lorsque Pierre a intégré leur classe, en première, il venait d’être placé dans une famille d’accueil pendant qu’on statue sur sa demande d’émancipation. Sa mère dépressive ne pouvait plus s’occuper de lui, et son père n’était quasiment jamais là, peu ravi de ce gamin qu’on lui a mis sur le dos. Il est mort sur un accident de chantier. Pierre n’éprouvait aucun regret à ce sujet, à part celui de ne pas avoir eu le temps de lui crier toute son amertume et son ressentiment quant à son absence. L’erreur que Lyes a commise était de lui avoir donné cette chance, parce que l’esprit de ce père défaillant était encore là, ancré sur Terre, qu’il ne parvenait pas à passer en raison de ses propres remords. Lyes a permis que cette conversation ait lieu alors qu’elle n’aurait pas dû.

Il a eu conscience d’avoir merdé sans comprendre pourquoi. L’émotion de Pierre était trop forte, trop confuse ; l’enjeu était trop important. Il s’en est ouvert à son frère, et ce dernier a simplement dit :

— Tu possèdes une magie qui va t’en faire voir de toutes les couleurs. Ne la laisse pas prendre le dessus, reste égoïste.

Depuis des années, Selim permet à des inconnus d’exorciser leur chagrin en retrouvant la trace de leurs disparus. Il se met à leur service, cherche l’empreinte des esprits et les raisons qui les poussent à s’attarder parmi les vivants, et les aide à partir. Lyes l’admire pour cela – surtout que Selim n’a jamais accepté un centime en échange de ce travail. La rencontre avec le père de Pierre a fait voler en éclats ses certitudes, car il a compris, ce jour-là, qu’il ne serait pas comme son frère, qu’il ne pourrait jamais faire autant de bien autour de lui.

Tu es l’un des deux seuls dévoreurs d’âmes de cette planète. Tu es bien plus fort que tous les médiums du monde réunis. C’est à double tranchant : à force de côtoyer les esprits, ils pourraient bien t’emporter. Ferme-toi. N’ouvre que rarement la porte et, quand tu t’y risques, prépare-toi.

À quoi peut bien servir un tel don s’il ne peut pas l’utiliser ? Lyes a suivi le conseil, pourtant, et a réussi à maintenir les fantômes à distance.

Jusqu’à ce que Lucas se tue en tombant d’une fenêtre, un soir de fête alcoolisée. Depuis, Lyes le cherche partout. Dans les couloirs du lycée, dans les rues qu’ils avaient l’habitude d’arpenter, dans le parc près de chez lui, où ils jouaient au basket. Dans les vagues devant lui, dans les ombres sur le sable, dans le silence de la nuit. Le soleil s’est éteint peu après la mort de Lucas, et Lyes leur en veut à tous les deux. Mais pas autant qu’il s’en veut à lui-même.

— On reviendra, dit Julien, le tirant de ses pensées. Quand tout ça sera fini, on terminera le voyage.

Julien et son calme, cette magie qui répare les fêlures sur le cœur. Lyes acquiesce, la gorge soudain serrée, incapable de répondre. Mais il n’a pas le temps de dire un mot car Kathia les rejoint à ce moment-là.

— Je leur ai promis de rentrer au plus vite, lâche-t-elle en se laissant tomber à genoux. J’en ai marre, je ne gagne jamais contre eux…

Elle balance son téléphone sur le sable comme si son contact la dégoûtait, puis se frotte les yeux pour en chasser des larmes naissantes.

— Ils ont essayé de joindre Selim mais ça ne répondait pas, ajoute-t-elle. Ils ont tenté chez Julien, aussi. Apparemment, le réseau est en rade à Orléans.

— Ne t’inquiète pas, on sera rentrés demain.

Kathia hoche la tête, mais cela ne semble pas l’apaiser pour autant.

— Mon père faisait comme s’il voulait me passer un savon et ça sonnait faux, fait-elle. Il avait l’air affolé. Il a dit aussi qu’on parlait du Somm dans les médias.

— Qu’est-ce qu’ils racontent ?

— C’est la panique partout, plein de routes seraient coupées, des supermarchés sont pillés, et on aurait entendu des coups de feu dans plusieurs villes.

La stupéfaction s’abat sur eux quatre. Lyes ne se doutait pas que l’épidémie de Somm prendrait une telle ampleur… Selim lui en avait parlé, mais il semblait penser que ça ne durerait pas.

Les nôtres sont sur le pont, l’affaire sera réglée en un rien de temps. Fais attention quand même, ce truc ne pardonne pas.

C’était il y a deux semaines, juste après la fébrilité qui s’était emparée du monde lorsqu’on a annoncé avoir découvert une preuve de la présence des esprits parmi nous. Lyes n’avait pas osé sortir de chez lui ces jours-là, il avait peur qu’on apprenne l’existence de son don et qu’on lui veuille du mal. Les choses se sont calmées, par chance, puis Selim est venu le prévenir : une étrange maladie sévissait, avec un taux de létalité élevé et rien pour l’enrayer. Une semaine plus tard, alors qu’ils étaient sur le départ, Selim l’a supplié de faire attention car de nouveaux cas avaient été détectés à Paris, et que la capitale allait être mise sous cloche pendant un temps. Personne n’était encore au courant… Selim n’était pas très chaud à l’idée que son petit frère parte en vadrouille, mais il en comprenait les raisons. C’est pour cela qu’il l’a couvert auprès de leurs parents.

— On sait si le Somm a contaminé d’autres villes que Paris ? demande Julien avec un rien de panique.

— Mon père ne m’a rien dit, mais je suppose que oui, si on décrète une quarantaine partout en France.

— Je vais poser la question à Selim, énonce Lyes. Avant, il faut qu’on bouge.

Ils se lèvent dans un même mouvement, puis quittent la plage en vitesse. Lyes ne peut s’empêcher d’admirer la mer une dernière fois quand ils atteignent la voiture. Juste un regard sur ce miroir désormais noir couvert de nuages. Il rêvait de voir cet endroit ; il a toujours adoré les falaises, qu’il s’imagine comme des armures, des citadelles dressées contre vents et marées. Lucas, lui, aimait les paysages des côtes bretonnes, les grèves et la mer aux mille nuances de bleus et de verts, les tempêtes, les lieux de naufrage. Voilà pourquoi cette étape, dans ce voyage inachevé.

— Tu veux que je conduise ? propose Pierre.

— Je veux bien, oui.

Lyes lui tend les clefs, puis prend place à l’arrière, à côté de Julien.

— J’ai trouvé un camping à dix kilomètres, dit Kathia, le nez dans son téléphone. Il n’est pas ouvert mais on pourra sans doute s’installer là.

Quelques minutes plus tard, les voilà lancés sur la route.

Le paysage défile, indifférent à la vague de terreur qui vient de s’abattre sur le pays. Pierre conduit prudemment ; même si les risques de croiser d’autres voitures dans le coin s’avèrent minces, il vaudrait mieux éviter de rencontrer la police ou les militaires. Ils dépassent des maisons le long de la voie. Les volets clos laissent passer la lumière, le signe que leurs occupants se calfeutrent chez eux ou qu’ils se préparent à un exode vers ailleurs le lendemain. Qu’est-ce qui serait le plus sage, entre rester chez soi ou s’éloigner des grandes villes ? Lyes se souvient d’avoir entendu son frère parler d’apparitions spontanées du Somm, mais c’était il y a quelques semaines maintenant. Les choses ont sans doute évolué.

Il remarque que Selim a essayé de le joindre plusieurs fois dans la journée. Malheureusement, Lyes ne peut pas rappeler à cause de la saturation du réseau, mais il peut encore accéder à Internet.

Il hésite. Que dire à Selim ? Par quoi commencer ? Après réflexion, il envoie simplement un « Désolé, je n’avais pas vu tes appels. Tout va bien ? » qui lui paraît assez hypocrite. Il n’a pas le temps de poser son téléphone que ce dernier se met à vibrer.

— C’est Selim, prévient-il ses amis.

Il prend l’appel en visio, et le visage fatigué de son frère apparaît, illuminé par l’écran de son ordinateur. Lyes est soulagé de le voir enfin.

— Comment tu vas ? demande Selim. Vous êtes où ?

— Tout va bien. On est toujours à Étretat.

— OK, tant mieux. Vous avez appris pour la quarantaine ?

— On l’a entendu à la radio. Ne t’inquiète pas, on va se poser quelque part pendant la nuit et on rentre demain.

Selim ne paraît pas convaincu par cette annonce ; du moins, quelque chose semble le chiffonner, à en croire ses sourcils froncés. Ses yeux sont rivés sur un autre écran.

— Vous êtes où exactement ? interroge-t-il.

— Juste avant Goderville, lance Pierre.

— D’accord. Tu penses pouvoir continuer jusqu’à Rouen ?

Pierre acquiesce sans la moindre hésitation.

— Vous allez devoir faire profil bas, reprend Selim. Les militaires se déploient un peu partout et vous risquez d’en croiser à Rouen. S’ils vous arrêtent et vous cassent les pieds, essayez de jouer les ados terrifiés qui rentrent de vacances. Kathia, vas-y franco sur les sanglots, ça fera son effet.

Lyes sourit brièvement en entendant la jeune fille s’esclaffer. En même temps, Selim a raison, elle a la larme facile et pleure pour un oui ou pour un non, ce qu’il lui fait souvent remarquer.

Il continue sans se démonter :

— Lyes, appelle Taly quand vous serez arrivés. Elle viendra vous chercher.

— Taly se rend à Rouen ?

— Elle s’y trouve déjà. Je… Comme je suis coincé à Paris, elle a bien voulu partir à ma place.

— Merde…

Le ton de Selim est contrit, comme s’il avait honte de l’avouer. Ce qui serait une première : Selim n’a honte de rien et assume toutes ses décisions, même les pires. Il n’a jamais eu grand-chose à foutre de l’avis des autres.

Mais là, la vie de Taly est en jeu, l’une de ses plus anciennes amies. Lyes se doute qu’elle n’a pas hésité une seconde à partir à leur recherche ; il s’en voudrait beaucoup s’il devait lui arriver quelque chose à cause d’eux. Sa mère avait raison, ils auraient dû ajourner le voyage…

— J’appelle Taly quand on arrive, confirme Lyes, qui hésite avant de demander : est-ce qu’on craint quelque chose avec le Somm ?

— Je ne peux pas t’assurer que non, ce truc échappe à toute logique. Tenez-vous éloignés des grandes villes.

Après un silence, Selim s’arrache à l’écran d’ordinateur qu’il parcourait des yeux – il est capable d’effectuer deux ou trois choses en même temps, comme une machine, ce qui a toujours forcé l’admiration de ses petits frères – et baisse la tête, ses deux mains posées sur le sommet de son crâne. Lyes se demande soudain s’il ne va pas se mettre à pleurer.

— Je suis désolé de ne pas pouvoir venir moi-même vous chercher, déplore son interlocuteur. Je dois tout faire pour stopper l’épidémie.

Selim ne lui dit pas qu’il n’a pas le choix, qu’il doit rester là-bas parce qu’il est l’un des seuls en mesure d’enrayer le Somm… Non, il lui dit qu’il préfère sauver le monde à les sauver tous les quatre. Et Lyes comprend tout à fait. Il aurait refusé le contraire.

Seulement, cela signifie aussi que Selim pourrait à son tour tomber malade. Cela signifie qu’il n’y survivrait pas.

— Ça ira, répond Lyes. Ne t’occupe pas de nous, fais ce que tu as à faire. Nous allons nous débrouiller.

— Super. Essaie de téléphoner à Maman si tu peux, moi je ne peux plus perdre de temps. Tiens-moi au courant s’il vous arrive quelque chose ou si vous ne parvenez pas à rejoindre Taly. Je ne vous répondrai peut-être pas tout de suite, mais je veux savoir où tu es et ce que tu fabriques.

— Compris.

— Ah, et… vous avez trouvé ce que vous cherchiez ?

Lyes secoue la tête. À côté de lui, ses trois amis ne perdent pas une miette de la conversation, et il voit les mines se fermer, Julien se tourner vers la fenêtre, Kathia triturer son propre téléphone.

— Non. Brest était la dernière étape, répond-il.

— Oh… Ne t’inquiète pas, vous pourrez rattraper le coup plus tard.

— Sans doute. Bon, je te laisse travailler. Je te tiens au courant de nos moindres faits et gestes.

— Merci. À plus.

Selim coupe la conversation sans lui permettre d’ajouter quoi que ce soit. Dépité, Lyes abandonne son téléphone sur la banquette, et plonge dans la contemplation de la nuit à travers la fenêtre, la route qui défile, les rares maisons au milieu des arbres. Les derniers mots de son grand frère résonnent dans sa tête parce qu’il s’est rendu compte que celui-ci lui a menti. Il sait quand Selim lui monte des bobards : en général, c’est lorsqu’il lui parle avec gentillesse et compréhension. Son frère n’est pas un modèle de tendresse, d’ordinaire.

Non, ils ne pourront sans doute pas rattraper le coup plus tard. Ils savent tous les deux que les esprits répondent à leur propre logique, et qu’un rendez-vous est manqué pour toujours lorsque l’on ne s’y rend pas. S’ils n’arrivent pas à temps à Brest pour l’anniversaire de Lucas, ils ne le retrouveront jamais… Peu importe l’endroit, disait Lyes à Kathia, et c’est vrai ; mais quand un rendez-vous est donné, il faut en respecter les modalités.

Là, ils font demi-tour avec leur chagrin et leur culpabilité qui pèsent plus lourd. Leurs chances s’envolent sans aucun espoir de retour, à mesure que leur voiture s’éloigne de Brest.